La chute des subventions, la flambée des coûts et un déficit durable poussent les organisateurs de Garorock à envisager un déménagement au Stade Atlantique, à Bordeaux. Une idée jugée impensable par les festivaliers, les habitants et le maire de Marmande, berceau du festival depuis 1997.
Depuis sa naissance dans les anciens abattoirs de Marmande, en 1997, Garorock n’a jamais été aussi proche de quitter la commune. L’édition 2025 a pourtant cartonné. Elle a accueilli près de 120.000 personnes sur la plaine de la Fihole, dont 78.000 campeurs, qui sont venus danser sur les rythmes de DJ Snake, Damso ou encore les Black Eyed Peas. Le festival est devenu aujourd’hui incontournable en France, mêlant rock, électro, rap et pop, avec des artistes de renommée internationale.
L’été prochain, Le «Garo», comme les habitués l’appelle, doit souffler sa 30e bougie. Seulement, une question subsiste : où va se dérouler la fête ? Tout part des révélations du journal Sud-Ouest, qui, en juin dernier, a confirmé des contacts avancés entre Bordeaux Métropole et les organisateurs pour un éventuel déménagement du festival pour l’édition 2026.
En 2024, Olympia Production (groupe Vivendi), a cédé l’évènement à CTS Eventim, géant européen de la billetterie. Le festival souffrant d’un déficit récurrent, supérieur à un million d’euros, les nouveaux propriétaires étudient de nouvelles pistes pour le rendre plus viable. Parmi les enjeux : doter le site d’une alimentation électrique fixe pour réduire l’usage des générateurs, améliorer son impact environnemental, et composer avec les contraintes d’un espace Natura 2000, où chaque édition nécessite d’acheminer l’eau et l’électricité.«Le festival est déficitaire, comme de nombreux festivals français… Les propriétaires ont vu l’esprit du festival, et ils ont apprécié. Mais je n’ai pas l’impression qu’ils soient enclins à porter le déficit très longtemps», confie au Figaro le maire de Marmande, Joël Hocquelet.
Alors, la société allemande a des envies d’ailleurs, et regarde vers Bordeaux. La métropole disposerait d’infrastructures existantes (stade, parkings, transports) et pourrait séduire par un accueil plus confortable et des coûts mutualisés. Des discussions porteraient sur le Stade Atlantique comme nouveau lieu potentiel. Depuis le 1er août, l’ancien «Matmut Atlantique» construit à l’occasion de l’Euro 2016, a été repris en régie publique. À l’inauguration, le directeur du stade Julien Cottin a d’ailleurs évoqué «des échanges, mais pas de décisions», avec les équipes de Garorock.
Sollicitées par Le Figaro, les équipes de Bordeaux Métropole indiquent qu’elles ne feront «pas de commentaires» sur la question. CTS Eventim, ainsi que Ludovic Labordie, directeur artistique et l’un des créateurs du festival, n’ont pas non plus répondu à nos demandes d’interviews.
Chez les fidèles, il faut dire que l’hypothèse fait bondir. Margaux, 26 ans, festivalière assidue depuis cinq années, est déjà «dans les starting-blocks» pour assister à la prochaine édition, et projette même de devenir bénévole. «Avec mes amis, ça fait des années qu’on arrive à tous se réunir au Garo. C’est nos vacances à nous ! Le festival fait partie de notre été. Si le festival part à Bordeaux, on perd plus que le lieu : on perd l’ambiance et l’identité. Garorock, c’est la campagne, c’est de l’herbe, des arbres et des sourires !» Contactés, plusieurs commerçants marmandais ne veulent pas trop se mouiller, et évoquent un «sujet sensible». «Le Garo, c’est quatre jours de frénésie, et ça fait vivre l’économie locale. On triple notre chiffre d’affaires, et on vit au rythme du festival, dans une ambiance exceptionnelle. S’il y a déménagement, on serait très déçus», nous confie l’un d’entre eux.
Joël Hocquelet le reconnaît : le modèle actuel atteint ses limites. «Les coûts d’aménagement du site sont lourds et la collectivité ne peut pas tout assumer», admet-il. Pour autant, l’élu multiplie les démarches pour garder Garorock à Marmande. Le 17 juillet 2025, le conseil municipal a arrêté la révision du Plan local d’urbanisme (PLU), intégrant des aménagements pour le festival, en autorisant notamment des infrastructures permanentes sur 1200 m². Une base sur pilotis avec plateforme en béton permettrait aussi d’installer tribunes, loges et structures démontables jusqu’à 15 m de hauteur. Ces aménagements incluront des énergies renouvelables et des accès sécurisés avec rampes et escaliers démontables. «On travaille beaucoup sur l’aménagement du site pour limiter les coûts, et que ça favorise un équilibre financier. L’esprit du Garo, il est ici. Je ne veux pas croire qu’il ne se passera rien à Marmande pour 2026», martèle Joël Hocquelet.
La décision finale devrait intervenir dans les prochains mois. Tous les ans, Garorock annonce sa programmation entre la fin du mois de novembre et le début du mois de décembre… Le suspense demeure.
