Le bourdonnement se sera révélé intensif cet été. « Depuis son repérage en 2007 en Charente-Maritime, cette période estivale est véritablement celle où la Fredon 17 (fédération agréée au titre d’organisme à vocation sanitaire) a reçu le plus grand nombre de sollicitations pour des demandes d’interventions d’enlèvement de nids de frelons asiatiques à pattes jaunes (vespa velutina) », rapporte la structure couvrant, au travers de ses 20 groupements, la Charente-Maritime, du nord au sud. « Sur les seuls mois de juillet et d’août, on a dépassé les 200 interventions. C’est énorme. On devait être à peine à 120 interventions l’année dernière sur la même période », complète le directeur Laurent Lay.
Une situation largement constatée. « On a jamais travaillé autant au mois d’août », confirme-t-on au sein de la société Chasseur de frelons installée à Aytré, dans l’agglomération rochelaise.

Laurent Theillet/SO
Conditions propices
Les conditions météorologiques des derniers mois ont favorisé le développement des colonies. D’abord avec un printemps profitable à l’entomofaune. Puis à une sécheresse estivale qui a multiplié les va-et-vient entre les points d’eau et les nids afin de les rafraîchir, et qui a également déshabillé précocement certaines essences, comme le peuplier – ce qui fait d’ailleurs relativiser un professionnel installé en Saintonge. « On est en avance : ce que l’on fait aujourd’hui, on l’aurait fait en octobre. »
Le fait est qu’il y a à faire. « Avec les épisodes pluvieux de ces derniers jours, le phénomène s’est amplifié avec la chute des feuilles qui laissent désormais apparaître dans les haies ou sur les arbres, à la vue de chacun, d’impressionnantes structures dont certaines mesurent 60 à 70 cm de diamètre et peuvent contenir entre 4 000 et 7 000 ouvrières », poursuit Fredon 17 dont le téléphone ne cesse de sonner : « Mairies, agents municipaux, exploitants agricoles sont parfois pris de panique et de stress face à l’effervescence et la forte activité des ouvrières sur le périmètre d’un nid. »
« Les rares mairies du département qui ont mis des pièges sélectifs [au printemps], afin de capturer les reines fondatrices en sortie d’hibernation, constatent un très net recul de la présence de nids »
Eric Mandon sait mieux que personne la virulence dont peuvent faire preuve les « pattes jaunes ». Il s’est attelé au nettoyage d’un terrain en friche cet été et c’est en attrapant une caisse retournée qu’il s’est soudainement fait attaquer. « Le temps de réagir, j’en avais plein les cheveux », partage-t-il. Piqué à la tête et aux bras, il a très vite été conduit à la pharmacie. Les médicaments ont permis d’atténuer la douleur quelques heures après. « J’étais loin d’imaginer qu’un nid pouvait se trouver au sol. Je les imaginais en hauteur. Mais non, ils s’installent partout. »
Un quadragénaire du Pays royannais a connu pire mésaventure. Le week-end du 15 août, il s’est fait piquer en sortant de la piscine, en fin de journée. « Je ne suis pas allergique à la base. » Sauf que très rapidement, s’en sont suivis démangeaisons, boutons, lèvre supérieure qui gonfle… « Ça m’a pris à la gorge. » Conduit aux urgences, il y a passé toute la nuit. Trois semaines après, son épiderme porte toujours la marque de la piqûre. « Il ne faut vraiment pas perdre de temps lorsque l’on se fait piquer », insiste-t-il.
Piéger au printemps
Fredon 17 en appelle ainsi à la plus grande prudence et s’applique à décourager les plus téméraires (ou les plus inconscients) à tenter de régler le problème par leurs propres moyens. D’une part à cause du risque pour soi-même, sachant que les dards peuvent passer au travers des combinaisons d’apiculteur : « Il m’est même arrivé que des frelons projettent le venin au travers de la grille du masque, m’atteignant à l’œil », se souvient un professionnel qui, depuis ce jour, complète sa panoplie avec une paire de lunettes. D’autre part à cause du risque sur la biodiversité : une intervention mal menée peut engendrer des nids secondaires aux impacts néfastes.
Le groupement compte prendre son bâton de pèlerin pour faire valoir la nécessité de procéder à des piégeages au printemps : « Les rares mairies du département qui ont mis des pièges sélectifs en place à partir du 25 janvier et jusqu’au 30 avril, afin de capturer les reines fondatrices en sortie d’hibernation, constatent un très net recul de la présence de nids par rapport à 2024, de l’ordre de 25 %. »
En revanche, les piégeages d’été ne sont d’aucune utilité, capturant trop peu de frelons pour avoir un réel impact et se révélant insuffisamment sélectifs, privant la flore de précieux pollinisateurs : coccinelles, cétoines, clairons, papillons ou encore syrphes.