Par
My de Sortiraparis, Cécile de Sortiraparis · Photos par
My de Sortiraparis · Mis à jour le 7 octobre 2025 à 15h48
Et si vous pouviez retrouver vos arrière-grands-parents dans les rues de Paris ? L’exposition Les Gens de Paris 1926-1936 au musée Carnavalet plonge dans les recensements inédits pour révéler les Parisiens de l’entre-deux-guerres. Du 8 octobre 2025 au 8 février 2026.
Nous avons poussé les portes du musée Carnavalet dans le 3e arrondissement de Paris pour découvrir une exposition exceptionnelle sur les Parisiens de l’entre-deux-guerres. Les gens de Paris, 1926-1936 s’appuie sur les premiers recensements nominatifs de la capitale pour dresser un portrait saisissant de la ville à son apogée démographique. L’exposition se tient du 8 octobre 2025 au 8 février 2026 dans les murs historiques du plus ancien musée parisien, et nous en revenons bouleversés.
Dès l’entrée, on plonge dans un Paris que l’on croyait connaître. Paris, 1921. La capitale atteint son record historique de population avec 2,89 millions d’habitants, un chiffre jamais égalé depuis. Dans les années qui suivent, entre 1926 et 1936, la Ville lumière dresse pour la première fois de son histoire des listes nominatives de ses habitants lors des recensements quinquennaux. Ces documents, conservés aux Archives de Paris, constituent une source inestimable pour comprendre qui étaient vraiment les Parisiens d’il y a cent ans.
En parcourant l’exposition, on découvre que contrairement aux autres communes françaises qui établissaient déjà ces listes, Paris n’avait jamais recensé nominativement sa population avant 1926. Ces trois recensements de 1926, 1931 et 1936 sont donc sans précédent. Chaque feuille manuscrite recense les habitants immeuble par immeuble, famille par famille, avec leurs noms, prénoms, dates et lieux de naissance, nationalités et professions. Près de 9 millions d’individus figurent dans ces registres qui révèlent une capitale en pleine mutation. On s’arrête longuement devant ces pages jaunies où s’alignent des vies entières résumées en quelques lignes d’encre.
Le musée Carnavalet-Histoire de Paris a exploré ces archives inédites pour renouveler notre regard sur le Paris de l’entre-deux-guerres. Fidèle à sa mission depuis 1880, le musée raconte l’histoire de la capitale et de ses habitants avec une approche à la fois documentaire et sentimentale. Cette nouvelle exposition s’inscrit parfaitement dans la tradition du musée Carnavalet qui, depuis plus de 140 ans, collecte et préserve la mémoire parisienne. Et le pari est réussi : on se retrouve captivés, émus même, par ces destins anonymes qui prennent vie sous nos yeux.
Au fil de notre visite, nous découvrons une ville cosmopolite où se côtoient ouvriers venus de province, immigrés du monde entier, artistes en quête de liberté et familles parisiennes de souche. On croise des personnalités célèbres comme Édith Piaf, Fernandel, Charles Aznavour ou La Goulue, mais ce sont surtout les anonymes qui nous touchent. Un chauffeur de taxi du 18e, une sténodactylo du quartier de l’Opéra, un ouvrier métallurgiste logé à Belleville… Chaque destin individuel compose la grande histoire collective de la capitale.
À travers photographies d’époque, cartes postales, objets du quotidien et infographies, l’exposition dresse un portrait en quatre temps : les lieux de naissance et nationalités, les professions exercées, les situations familiales et la répartition dans chaque quartier et immeuble. On visualise ainsi comment se structurait la vie parisienne, des beaux quartiers de l’Ouest aux faubourgs populaires de l’Est, des ateliers d’artisans du Marais aux cafés-restaurants comme celui immortalisé sur une carte postale, Au Réveil Matin, situé avenue Jean-Jaurès dans le 19e arrondissement. Cette image d’un café populaire des années 30 nous fascine particulièrement.
Ce qui nous frappe, c’est combien les thématiques abordées résonnent avec notre époque : migrations, droits des enfants, politiques familiales, libertés amoureuses, lois sociales, urbanisme, histoire du travail et chômage. Cette période correspond à celle des années folles, mais aussi à celle des crises économiques et des tensions sociales qui précèdent la Seconde Guerre mondiale. On réalise que nos préoccupations actuelles ne sont finalement pas si nouvelles.
- À lire aussi
- Bons plans de cette semaine à Paris, du 6 au 12 octobre 2025, les sorties gratuites ou abordables
- Musées et monuments gratuits : les lieux à voir ce dimanche 2 novembre à Paris et en Île-de-France
- Musées et Monuments gratuits à Paris et en Île-de-France : Les bons plans culturels
L’exposition s’appuie sur le projet d’océrisation des recensements de la population parisienne (POPP), mené par des chercheurs du CNRS et de l’INED. Cette prouesse technique a permis de transformer ces millions de pages manuscrites en base de données exploitable grâce à l’intelligence artificielle. Une belle opportunité pour les généalogistes qui peuvent désormais retrouver leurs ancêtres parisiens en quelques clics sur le site des Archives de Paris.
L’exposition bénéficie d’un commissariat d’exception avec Valérie Guillaume, directrice du musée Carnavalet, Hélène Ducaté, chargée de mission scientifique, et Sandra Brée, chargée de recherche au CNRS, commissaire invitée. On sent leur passion dans chaque choix scénographique, chaque document exposé. Le travail de Sandra Brée sur l’étude démographique de la population parisienne de cette période charnière éclaire l’ensemble du parcours.
Profitez-en pour prendre le temps de flâner dans les salles du musée Carnavalet, ce véritable joyau architectural du Marais. Installé dans deux hôtels particuliers Renaissance reliés par une galerie, le lieu en lui-même vaut le détour. Il fut fondé en 1880 sur l’initiative du Baron Haussmann, alors en pleine transformation de Paris. L’hôtel Carnavalet lui-même, construit entre 1548 et 1560 pour Jacques des Ligneris, président du Parlement de Paris, est l’un des rares exemples d’architecture Renaissance parisienne. De 1677 à 1696, la célèbre épistolière Madame de Sévigné y vécut. On imagine la dame écrivant ses fameuses lettres dans ces murs chargés d’histoire.
Avec près de 625 000 œuvres dans ses collections, le musée Carnavalet est l’un des plus importants musées français. Au-delà de l’exposition temporaire, nous profitons de notre visite pour admirer quelques trésors : la chambre de Marcel Proust reconstituée à l’identique, le décor Art nouveau de la bijouterie Fouquet signé Alphonse Mucha, ou encore la célèbre enseigne du cabaret Le Chat Noir. Après quatre années de rénovation achevées en 2021, le musée propose un parcours repensé et des espaces modernisés, tout en conservant l’âme des lieux. Le résultat est bluffant.
On note que le musée Carnavalet ne se contente pas de cette exposition. Une programmation culturelle riche accompagne l’événement avec des soirées dans son Orangerie, accessible par le 14 rue Payenne. Au programme : les conditions de vie à Paris le 23 octobre 2025, les récits et trajectoires de vies le 14 novembre, l’intelligence artificielle au service de l’histoire le 27 novembre, la jeunesse parisienne le 4 décembre, les identités parisiennes le 11 décembre, ou encore les visages de Paris le 15 janvier 2026. Des visites guidées sont également organisées tous les samedis à 10h avec les intervenantes culturelles du musée. Une occasion d’approfondir certains aspects de l’exposition.
En sortant, on se dit que cette exposition invite à mieux nous connaître, individuellement et collectivement. Elle nous rappelle que Paris a toujours été une ville d’accueil, de brassage, de diversité. Que les Parisiens d’il y a cent ans n’étaient pas si différents de nous. Leurs préoccupations, leurs espoirs, leurs difficultés font écho aux nôtres. Dans cette mosaïque de vies retrouvées, on a l’impression de retrouver un peu de notre propre histoire familiale et de mieux comprendre d’où vient la capitale que nous foulons chaque jour.
Pourquoi y aller ? Cette exposition s’adresse à tous ceux qui se passionnent pour l’histoire de Paris, mais pas seulement. Les amateurs de généalogie y trouveront une mine d’informations et pourront prolonger leur visite par des recherches sur le site des Archives de Paris pour retrouver leurs ancêtres. Les curieux d’urbanisme et d’architecture découvriront comment la ville s’organisait, quartier par quartier, immeuble par immeuble. Les passionnés de sociologie apprécieront les données démographiques présentées de manière claire et visuelle.
On y va aussi en famille pour transmettre aux plus jeunes l’histoire de leur ville, ou entre amis pour partager un moment culturel dans un cadre exceptionnel. L’exposition est accessible à tous les publics, même à ceux qui ne connaissent pas forcément l’histoire parisienne. Le parcours se veut pédagogique sans être ennuyeux, émouvant sans tomber dans le pathos. On en ressort avec l’envie d’en savoir plus sur ses propres racines et sur cette capitale qui ne cesse de se réinventer tout en restant fidèle à son âme.
Le musée Carnavalet se situe au 23 rue de Sévigné dans le 3e arrondissement, à quelques pas de la place des Vosges et en plein cœur du quartier historique du Marais. Accessible en métro par les stations Saint-Paul (ligne 1) ou Chemin Vert (ligne 8), le musée est ouvert du mardi au dimanche de 10h à 17h45, avec une fermeture des caisses à 17h15. Attention, le musée reste fermé les lundis et certains jours fériés.
Le tarif d’entrée à l’exposition Les Gens de Paris, 1926-1936 est de 15 euros en plein tarif et 13 euros en tarif réduit, avec des réductions et gratuités disponibles sur le site des musées de Paris. Bon plan : les collections permanentes restent en accès gratuit, ce qui permet de prolonger la visite sans se ruiner.
Une belle découverte à faire pour tous les passionnés d’histoire urbaine, de généalogie ou simplement curieux de comprendre comment vivaient nos aïeux dans une capitale à son apogée. Le musée Carnavalet confirme une fois de plus son rôle essentiel de gardien de la mémoire parisienne et de passeur d’histoires entre les générations. On en ressort avec l’envie d’y retourner et de se plonger dans ces archives pour retrouver peut-être, qui sait, la trace de nos propres ancêtres parisiens.




































