Remarquable compagnie de danse israélienne, adorée du public et fidèle depuis toujours à Montpellier Danse, la Batsheva Dance Company devait créer l’événement en ouverture de la 45e édition ce samedi 21 juin. Las ! L’aéroport de Tel Aviv étant fermé en raison du conflit avec l’Iran, elle doit annuler sa venue.
Au regard du conflit qui fait aujourd’hui rage entre Israël et l’Iran (sans rien dire de celui qui perdure dans la Bande de Gaza), cela semblera sans doute un « dommage collatéral » bien bénin. Mais tout de même : la Batsheva Dance Company ne va pas pouvoir venir faire l’ouverture ce samedi 21 juin de la 45e édition de Montpellier Danse, le plus important événement pour la danse contemporaine en France et clairement au-delà. En raison des événements, l’aéroport de Tel Aviv est actuellement fermé, et El Al, la première compagnie aérienne d’Israël, a annoncé officiellement dimanche soir qu’elle n’opérerait aucun vol avant jeudi, au plus tôt.
Un spectacle dédié à Jean-Paul Montanari
« Nous étions impatients d’être parmi vous, a confié Dina Aldor, la directrice exécutive de la Batsheva dans son message d’annulation adressé à Montpellier Danse. Le festival a toujours été pour nous, un lieu de soutien artistique, un lieu de rencontre, de dialogue et d’échange avec les artistes, le public, nos collègues et nos partenaires. Quelle tristesse de ne pouvoir participer à cette édition spéciale. »
Contrairement à ce qui avait été initialement programmé (Anafaza, pièce culte reprise en 2023 pour ses 30 ans), le chorégraphe Ohad Naharin qui dirige la compagnie depuis trente-cinq ans avait décidé de donner à Montpellier sa dernière création MOMO : « Je suis intimement convaincu que MOMO, ma dernière création qui n’a jamais été montrée à Montpellier, serait une très belle soirée, peut-on lire de sa plume sur le site du festival. Nous la travaillons en ce moment, et elle est sublimement interprétée par les danseurs. » La Batsheva avait décidé de dédier ce spectacle à Jean-Paul Montanari, le directeur historique de Montpellier Danse, décédé le 25 avril.
Jean-Paul Montanari, en effet, a toujours défendu avec passion et raison le travail de la compagnie de danse israélienne et l’œuvre de son chorégraphe Ohad Naharin. Contre vents et marées, même : en dépit de ses notoires engagements à gauche et de ses déclarations clairement opposées au gouvernement Nétanyahou, Ohad Naharin et sa troupe sont régulièrement cibles des appels au boycott. Montpellier n’y a jamais cédé et le public lui en a toujours été reconnaissant, faisant systématiquement un triomphe à ses créations. Les trois représentations prévues de MOMO (samedi en ouverture à 20 h, et dimanche à 17 h et 20 h) affichaient complet, autrement dit 6 000 personnes attendaient l’événement et d’autres encore, sur liste d’attente, l’espéraient aussi !
Deuxième annulation en deux ans
En 2024 déjà, la compagnie avait renoncé à la tournée de ses pièces en France, « pour des raisons de sécurité des danseurs, de notre propre initiative et sans aucune pression ». À l’inverse d’autres institutions culturelles européennes (Pays-Bas, Espagne, Italie) qui avaient en effet choisi d’annuler les représentations de la Batsheva, en concertation avec celle-ci, sitôt après le massacre du 7 octobre, les structures françaises avaient décidé d’un commun accord de les maintenir, dont la Villette à Paris et Montpellier Danse. Rebelote donc cette année pour d’autres – ou presque – raisons.
« Je tiens à vous remercier du fond du cœur pour les efforts considérables que vous avez déployés pour rendre notre visite possible dans les circonstances difficiles actuelles, insiste la directrice exécutive de la Batsheva dans son courrier. Nous nous souviendrons toujours de votre solidarité et de votre soutien. Veuillez également transmettre notre gratitude à votre conseil municipal et au maire. » Et de terminer par un message sans ambiguïté : « Nous nous joignons à l’espoir de nombreuses personnes dans notre région angoissée, appelant à la fin immédiate de la violence et croyant en notre capacité humaine à parvenir à la réconciliation et à la compréhension, pour une vie sûre et digne pour tous. En prière pour la paix, toujours. »